La ville d’Ougarit, située dans l’actuelle Syrie, fut une cité majeure du Proche-Orient au cours du IIe millénaire av. J.-C. Ougarit servait de carrefour commercial, entretenant des relations avec Chypre, la Crète minoenne, ainsi qu’avec les puissants Empires hittite et égyptien. Bien avant sa découverte archéologique, des tablettes cunéiformes datant de 1800 av. J.-C., retrouvées à Ebla, faisaient déjà mention de la cité. C’est en 1928 qu’un paysan découvre par hasard une tombe en pierre, ce qui conduit à l’alerte des autorités archéologiques françaises en Syrie, alors sous protectorat français. Les archéologues Claude Schaeffer et René Dussaud commencent alors des fouilles, mettant au jour les ruines de la cité à Ras Shamra. Aujourd’hui, c’est l’un des plus importants sites archéologiques de la région, bien que menacé par les troubles politiques et le pillage.
Les fouilles ont révélé une région sous l’influence de la cité d’Ougarit, surnommée le royaume d’Ougarit. De nombreuses tablettes trouvées sur le site ont apporté des éclairages sur l’Antiquité dans la région, notamment sur la culture cananéenne, ancêtre des Hébreux et des Phéniciens. La civilisation d’Ougarit était cosmopolite, utilisant plusieurs langues et adoptant diverses influences architecturales, comme en témoignent les somptueux palais comparables à ceux de la Crète minoenne.
Malgré sa splendeur, Ougarit ne put résister aux grandes puissances de l’époque. La cité passa sous domination égyptienne puis hittite, devenant un lieu de conflits entre ces deux superpuissances. La fin de cette civilisation fut causée par les invasions des peuples de la mer aux XIIIe et XIIe siècles av. J.-C., et non par ses voisins.
Chronologie d’Ougarit
La région syrienne est habitée depuis des temps très anciens, avec des traces de fortifications remontant à 6000 ans av. J.-C. Ougarit devint une grande ville autour de 2000 av. J.-C., grâce à ses échanges commerciaux avec l’Égypte. L’origine de cette civilisation est difficile à définir, mais elle est probablement l’ancêtre des Cananéens et a été influencée par la culture suméro-akkadienne. Le royaume d’Ougarit fut sous la domination de l’empire du Mitanni au XVIIIe siècle av. J.-C., puis passa sous contrôle égyptien au XVe siècle av. J.-C., après l’effondrement du Mitanni.
Le roi Ammistamrou II d’Ougarit fut vassal du pharaon Amenhotep III vers 1350 av. J.-C., puis Niqmaddou II fut vassal d’Akhenaton vers 1338 av. J.-C. Cependant, le roi Ar-Halba tenta de s’allier avec le roi de Kadesh contre les Hittites, mais échoua. Son frère Niqmepa VI rétablit la paix en se soumettant à l’Empire hittite.
Au XIIIe siècle, Ougarit devint un fidèle vassal des Hittites, soutenant leur guerre contre l’Égypte de Ramsès II. Cependant, les invasions des peuples de la mer déstabilisèrent la région, entraînant la destruction de la capitale hittite Hattusa et d’Ougarit. Le dernier roi d’Ougarit, Hammourabi III, témoigne du chaos de cette période dans une lettre décrivant les attaques et la destruction subies par son royaume.
Culture et données archéologiques
Le site archéologique d’Ougarit, remontant à 6000 ans av. J.-C., est l’une des premières villes historiques. La cité connut son âge d’or à partir de 2000 av. J.-C., avec un palais royal de quatre-vingt-dix chambres, des bibliothèques privées et de nombreux espaces de vie. Les temples principaux étaient dédiés à Baal et Dagon, avec un grand temple bibliothèque unique pour sa diversité et la quantité de documents.
Ougarit était un carrefour commercial, reliant la Méditerranée à la Mésopotamie. La ville était cosmopolite, divisée en deux castes principales : les hommes du roi (administrateurs, marchands, artisans) et les fils d’Ougarit (agriculteurs). Les écrits retrouvés sur les tablettes d’argile montrent l’usage de quatre types d’écriture : l’akkadien, l’hourrite, le sumérien et l’ougaritique, ce dernier ayant une influence sur les futurs alphabets cananéens et phéniciens.
La religion ougaritique
Dans le panthéon ougaritique, El, le père de la création, était le dieu primordial, équivalent d’Anu chez les Sumériens. Il était représenté comme un vieil homme ou un taureau, symbole de fertilité. Ses fils, les Élohim, comprenaient des divinités comme Adad (dieu du ciel et de l’orage) et Ashéra (déesse mère), qui influencèrent les croyances cananéennes et hébraïques.
Les rois d’Ougarit étaient divinisés et servaient de lien entre les humains et les dieux. Le clergé bien organisé comprenait prêtres, prêtresses, musiciens et devins, avec des temples orientés nord-sud, comme ceux de Baal et Dagon. Les sacrifices, réalisés par le roi, étaient courants lors de fêtes particulières.
Les Ougaritains pratiquaient diverses formes de divination et de rituels pour se protéger des maux. Ils croyaient que les morts devenaient des esprits, et certains devenaient des divinités après leur mort. Les textes d’Ougarit montrent une société religieuse complexe, influencée par les cultures environnantes.
Ougarit joua un rôle crucial dans la transmission des mythes et des croyances, notamment vers les Hébreux et les Phéniciens. Les récits mythologiques comme celui du Déluge de Noé trouvent leurs origines dans les mythes sumériens, transmis par le biais d’Ougarit. Les dieux nationaux, nés à Ougarit, influencèrent les croyances cananéennes et la genèse du monothéisme hébraïque.