La mythologie maya est d’une grande richesse, bien que trop peu connue, en grande partie due à la destruction des conquistadors qui ont brûlé une bonne partie des textes au 16ᵉ siècle, considérant qu’ils étaient de nature diabolique. La principale source des mythes mayas nous vient du Popol Vuh, un texte du 16ᵉ siècle composé par des Mayas Quichés qui ont voulu laisser une trace de leurs anciens mythes. Ensuite, nous avons les Chilam Balam, qui furent écrits au cours des 16ᵉ et 17ᵉ siècles par les successeurs des Mayas. Cependant, même si ces textes conservent l’héritage des anciens mythes, ils s’inscrivent dans une démarche de syncrétisme avec la religion chrétienne. La troisième source nous vient des nombreux vestiges qui offrent une illustration aux mythes retrouvés dans les textes de la mythologie maya, ainsi qu’à de nombreux autres qui ne furent malheureusement pas conservés à l’écrit, ce qui rend leur interprétation délicate.
La création du monde

Au commencement des temps, il n’existait que le ciel infini et la mer paisible. Huracan, ou « Cœur du Ciel », vivait dans les cieux, et Gucumatz, ou Kukulkan, le seigneur aux plumes vertes, vivait sous les eaux. Un jour, ils se mirent à parler ensemble de l’avenir du monde et se mirent d’accord pour lui donner vie. Voici le déroulé des événements de la mythologie maya :
Gucumatz fit apparaître la terre depuis les eaux, et Huracan fit rouler le tonnerre. De ces forces magiques conjuguées vont naître les montagnes, les forêts et la nature fertile sous tous ses aspects. Mais les dieux n’étaient pas encore satisfaits : ils devaient créer des êtres vivants qui pourraient les honorer et les nourrir. Ils se mirent à la tâche et créèrent les animaux, les serpents, les oiseaux, les fauves, mais encore les poissons et toutes les autres créatures. Malheureusement, ces premiers êtres n’étaient pas capables de parler avec un langage élaboré et ne pouvaient qu’émettre des bruits ou des gazouillements. Les dieux n’étaient pas satisfaits et condamneront la faune à la servitude pour leurs futures créations.
« Vous serez désormais condamnés à être pourchassés, tués et mangés ! »
Les dieux entreprirent alors de créer un être plus parfait, apte à les honorer et les nourrir. C’est ainsi que les premiers hommes furent créés avec de la glaise ou de la terre humide. Malheureusement, ce fut un échec : les hommes de boue n’étaient pas plus intelligents que les animaux, ne pouvaient toujours pas parler et se désagrégeaient au contact de l’eau. Les dieux décidèrent de les détruire, puis consultèrent le vieux couple de devins Ixpiyacoc et Ixmucane, qui consulta les augures. Le couple indiqua aux dieux qu’ils devraient créer la prochaine race avec du bois.
Les dieux se remirent à la tâche et créèrent une nouvelle humanité taillée dans le bois, mais le résultat n’était pas plus probant : ces hommes de bois n’étaient que des mannequins desséchés, sans aucune sagesse et sans esprit. De nouveau, les dieux décidèrent de détruire leurs créations avec un déluge de résine pour les pétrifier, et lancèrent une cohorte de démons afin de les pulvériser.
Gucumatz et Huracan n’abandonnèrent pas, bien décidés à créer des humains qui pourraient les nourrir et les honorer, mais il leur fallait le matériau idéal pour leur conception. Ils sollicitèrent l’aide d’un renard, d’une perruche, d’un coyote et d’un milan pour trouver la substance qui leur serait nécessaire aux royaumes de Paxil et Cayala (des montagnes où se trouvaient toutes les graines de la création). Les animaux rapportèrent des graines de maïs blanc et de maïs jaune, et les dieux les portèrent chez la vieille Ixmucane, qui les moulut et en fit une farine. De cette mixture, elle donna naissance aux quatre premiers humains. Ces derniers étaient vifs d’esprit, rendaient hommage aux dieux et étaient aptes à cultiver la terre. La création était parfaite.
Mais les dieux Gucumatz et Huracan étaient inquiets : ces hommes étaient dotés de sagesse et étaient presque semblables aux dieux, car ils pouvaient voir les secrets du ciel. Alors, les dieux décidèrent de limiter leurs pouvoirs : ils voilèrent leur vision et leur donnèrent quatre belles compagnes afin qu’ils oublient leur omniscience perdue. C’est de ces quatre couples primordiaux que naîtra toute la race des Mayas Quichés. Le monde était maintenant terminé, et c’était l’heure de la première aube sur l’humanité, qui pourrait honorer les dieux et les nourrir jusqu’à la fin des temps…
L’organisation du monde
Dans la mythologie maya, le monde est divisé en trois parties : les cieux, l’inframonde et la terre des hommes.
Les cieux :
Pour commencer, les cieux se divisent eux-mêmes en 13 strates, chacune présidée par une divinité. Au plus haut niveau se trouvait Hunab Ku, le créateur suprême. Il est cependant probable que ce concept soit né du syncrétisme avec le monothéisme chrétien après la période de colonisation.
Toujours dans les cieux, nous avons Itzamna, qui représente le soleil. C’est un dieu bénéfique du ciel, de la nuit et du jour. Il est l’inventeur de l’écriture et préside aux cérémonies religieuses. Itzamna est uni à sa parèdre Ix Chel, qui est la déesse de la lune. Parmi les divinités les plus importantes attestées dans la période préhispanique et qui vivent dans les cieux, nous avons :
- Chiac, le dieu de la pluie et des éclairs [équivalent de Tlaloc chez les Aztèques]. C’est probablement le dieu le plus important du panthéon puisqu’il préside à la fertilité.
- Gucumatz ou Kukulkan, assimilé à Quetzalcoatl des Aztèques. Il est le dieu de la résurrection. Il est le serpent à plumes et l’une des divinités principales des Mayas, bien qu’il semble que son origine se trouve dans le secteur de Teotihuacan.
- Tohil, le dieu du feu préposé à la guerre et aux sacrifices.
- Enfin, Huracan est le dieu des vents et des tempêtes, mais également du tonnerre, qui participe à la création de l’humanité.
Tous habitent les cieux, mais les dieux sont complexes dans les mythes mayas. Ils n’ont pas toujours de rôle bien défini et peuvent changer d’aspect et de nom suivant les circonstances. Notons encore que le panthéon évolue au cours des périodes classique et post-classique. Les 13 cieux se trouvent dans un plan vertical et sont reliés à la terre aux quatre points cardinaux par les Bacab. Il s’agit de quatre frères qui supportent la voûte céleste.
La terre :
Le deuxième espace de la cosmogonie est la terre. Contrairement aux cieux, elle se trouve sur un plan horizontal et a une forme carrée. Elle se divise en quatre quadrants, chacun symbolisé par une couleur : le rouge à l’est, le blanc au nord, le noir à l’ouest et le jaune au sud. Le centre était vert et représentait le centre du monde, où convergent les énergies. C’était aussi l’axe du monde avec l’arbre Yaxche, dont les racines s’enfonçaient dans le monde souterrain et les branches s’étendaient dans les cieux. Il représentait le paradis des Mayas.
L’inframonde (Xibalba ou Metnal) :
Le troisième espace de la mythologie maya est l’inframonde, appelé Xibalba ou Metnal. De la même façon que les cieux, il se trouve dans un plan vertical sous la terre. Il est composé de 12 niveaux ou de 9, selon les sources postérieures influencées par le syncrétisme chrétien. Chaque niveau est régi par un seigneur.
Aux premiers niveaux se trouvaient Hun Came et Vucub Came, qui étaient les juges des âmes, un peu à la manière des juges de l’enfer dans la mythologie grecque. Zipacna, le monstre caïman qui détruit les montagnes, était le fils de Vucub Came. Ces figures sont les principaux antagonistes de la légende des jumeaux héroïques, qui font un voyage à Xibalba afin de vaincre les puissances des ténèbres. Nous trouvons ensuite plusieurs seigneurs à chaque niveau. Chacun était préposé à des tortures particulières, suivant les fautes des hommes. Cependant, l’influence chrétienne est palpable dans ces notions, que l’on peut rapprocher des neuf cercles de l’enfer.
Au 9ᵉ niveau se trouve Ah Puch ou Ah Cimi, le dieu des morts et seigneur suprême de Xibalba. Il est le rival d’Itzamna, en symétrie avec les cieux. Il a l’apparence d’un squelette, parfois avec une tête de hibou. Son monde est glacial et symbolise l’obscurité éternelle, ou encore la fin de toutes choses. Dans le Xibalba, nous trouvons aussi six demeures qui appartenaient aux dieux de la mort et servaient de salles d’épreuves. Elles se nomment :

- Maison Obscure
- Maison du Froid
- Maison des Jaguars
- Maison des Chauves-souris, où règne le terrible Camazotz, un vampire
- Maison des Lames d’Obsidienne
- Maison du Feu
Les Mayas croyaient que certaines grottes ou cénotes étaient des entrées de Xibalba. L’eau représentait alors la frontière entre le monde des morts et celui des vivants. La plupart des hommes étaient destinés à y aller et devaient accomplir un long périple semé d’embûches pour traverser les étages. Les dieux pouvaient également mourir et partaient pour Xibalba, mais contrairement aux mortels, ils ressuscitaient dans le niveau des cieux symétrique à celui du monde des morts. Cela était aussi valable pour les rois, qui bénéficiaient de faveurs particulières. Certains temples, comme celui de Chichén Itzá, étaient situés à proximité d’un cénoté, et donc d’une porte vers Xibalba. Le sanctuaire faisait alors office de lieu de communication entre les cieux, la terre et les enfers.
Conclusion
La mythologie maya nous offre une vision du monde à la fois riche et complexe, où chaque élément de l’univers trouve sa place au sein d’un équilibre cosmique structuré en trois niveaux : les cieux, la terre et Xibalba, l’inframonde. Cette organisation du monde reflète une conception cyclique de l’existence, où la vie et la mort ne sont que des étapes d’un voyage perpétuel.
Les dieux, omniprésents, jouent un rôle fondamental dans l’ordre cosmique, influençant les phénomènes naturels et les destinées humaines. L’importance accordée aux rites et aux sanctuaires, souvent situés à des points stratégiques entre les mondes, témoigne de la volonté des Mayas de maintenir une harmonie entre ces sphères.
Aujourd’hui encore, les vestiges de cette cosmologie transparaissent dans les traditions et croyances de certains peuples descendants des Mayas, conservant ainsi une partie de cet héritage sacré. L’étude des mythes et du panthéon maya permet non seulement de mieux comprendre leur vision de l’univers, mais aussi d’appréhender leur profond respect pour les cycles de la nature et les forces invisibles qui régissent l’ordre du monde.
Bibliographie
- Karl Taube, Mythes aztèques et mayas
- Michel Boccara, La religion populaire des Mayas : entre métamorphose et sacrifice
- Claude-François Baudez, Une histoire de la religion des Mayas : du panthéisme au panthéon
- Franco Sandoval, La cosmovisión maya quiché en el Popol vuh
- Lien : http://www.americas-fr.com/civilisations/legendes/mayas.html
- Lien : https://mythologica.fr/maya/index.htm
