Rome et la Calédonie

Depuis l’an 43 Rome avait conquis le sud de la Bretagne et écrasé la rebellion menée par la reine Boudicca. Les tribus calédoniennes connaissaient donc la réputation des légions romaines et ces fiers guerriers se préparaient à défendre vaillamment leur terre.

Les hostilités commencèrent en 79 quand Agricola, gouverneur de Bretagne, envoya une flotte surveiller et cartographier les côtes de Calédonie. En 83 le sud du pays était tombé et les tribus du nord fourbissaient leurs armes face à une invasion imminente. Conscients de la supériorité de l’armée romaine, aussi bien en matériel qu’au point de vue de l’organisation, les Calédoniens adoptèrent une tactique de guerrilla, attaquant les camps fortifiés ou les petites troupes isolées. Tactique efficace puisque la IXe légion fut presque entièrement détruite lors d’une attaque surprise nocturne, elle ne dut son salut qu’à l’arrivée opportune de la cavalerie d’Agricola. À l’été 84 les légions s’étaient déjà profondément aventurées dans le nord-est du pays. C’est là, dans un endroit que les Romains appelèrent Mons Graupius (quelque part dans les Monts Grampians), que les Calédoniens commirent l’erreur fatale de se confronter directement à l’armée romaine. Tacite rapporte qu’avant la bataille Agricola harangua ses hommes avec ces mots: « Cela fait sept ans, mes camarades, que votre courage, la divine bénédiction de Rome et mes loyaux efforts conquièrent la Bretagne. Toutes ces campagnes, toutes ces batailles ont exigé tant de courage face à l’ennemi, de patient labeur face à la Nature elle-même ! Et nous avons repoussé les frontières qui avaient arrêté les gouverneurs précédents et leurs armées. Notre emprise sur la Bretagne est assurée, non par des racontars ou des rumeurs, mais par notre force ! Combien de fois, lorsque nous marchions d’un pas hésitant à travers les marais, les montagnes et les rivières, ai-je entendu les plus braves d’entre vous demander d’une voix forte : « Quand trouverons-nous l’ennemi ? quand allons-nous nous battre ? » Eh bien les voilà, ils sont sortis de leur repaire ! Le champ de bataille s’offre à vous, tel que vous l’avez ardemment désiré ! « 

On estime qu’environ trente-mille guerriers firent face à quinze-mille Romains. Les Calédoniens, positionnés en hauteur, avaient l’avantage du terrain mais, tout comme Boudicca une quarantaine d’années auparavant, il leur manquait l’organisation, la discipline et le sens tactique des légions de Rome. Les rangs serrés et les épées courtes des troupes romaines, constituées de conscrits venus de Germanie, de Hollande et de Belgique encadrés de vétérans romains, firent des ravages dans le corps-à-corps qui suivit le choc frontal des deux armées. Voulant profiter de leur supériorité numérique, les Calédoniens tentèrent de contourner la mêlée pour attaquer les Romains sur les côtés. Mais encore une fois ce fut une charge de cavalerie qui les repoussa. Avec cette intervention de la troupe montée les espoirs de victoire calédonienne s’évanouirent et le bain de sang qui s’ensuivit coûta la vie à dix-mille hommes. Les survivants s’enfuirent dans les forêts et les montagnes environnantes, contraints de brûler leurs maisons et de tuer épouses et enfants de leurs propres mains, la mort étant à leurs yeux moins cruelle que les représailles romaines.

Le destin des tribus calédoniennes semblait scellé mais le sort en décida autrement. L’empereur Domitien rappela Agricola à Rome pour l’envoyer en Germanie. Les Romains se retranchèrent alors plus au sud et en 122, entre les estuaires de la Solway et de la Tyne, le mur d’Hadrien fut achevé. Ce mur marquait la frontière la plus septentrionale de l’empire.

Antonin le Pieux succéda à Hadrien. Il repoussa la frontière encore plus au nord, entre les rivières Forth et Clyde, pour y faire construire un autre mur, le mur d’Antonin. L’érection de ce mur avait un but principalement de propagande ;l’empereur agrandissait le territoire de l’empire. À la mort d’Antonin son mur fut abandonné et les légions se repositionnèrent derrière le mur d’Hadrien.

À l’exception de quelques escarmouches, une période de paix s’instaura au nord de la Bretagne et c’est en 306 que l’empereur Constance Chlore vit la frontière nord de son empire menacée par des attaques pictes sur le mur d’Hadrien. Mais qui étaient ces Pictes et d’où venaient-ils ? Les premières mentions d’eux en tant qu’ennemis de Rome datent de 297. Beaucoup d’historiens pensent que les Pictes étaient tout simplement une tribu parmi les autres, mais il est plus probable que ce peuple soit le résultat de l’union des tribus qui vivaient au nord du mur d’Hadrien. Il existe aussi une hypothèse, très improbable selon la majorité des historiens, qui dit que les Pictes seraient les descendants des Scythes qui ont fui face à l’invasion des Sarmates au troisième siècle avant Jésus Christ.

Profitant de l’affaiblissement de Rome les Pictes devinrent de plus en plus téméraires et en 360, alliés aux Gaels irlandais, ils lancèrent des attaques coordonnées au delà du mur d’Hadrien. L’empereur Julien envoya des légions qui ne purent empêcher les raids pictes de s’enfoncer toujours plus loin dans le sud.

En 411 les légions romaines quittèrent la Bretagne pour défendre l’empire aux prises avec les invasions barbares. Les Romano-Bretons demeurés sur l’île louèrent alors les services d’autres barbares, les Angles et les Saxons, pour combattre les Pictes.

Venus défendre la Bretagne contre les invasions pictes, les Angles et les Saxons deviendront les Anglo-Saxons quelques siècles plus tard et seront, par une ironie dont l’Histoire a le secret, les voisins envahissants de l’Écosse.

Groucho

Sources : www.historicuk.com www.macgregor.tripod.com

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